ET SI ON RECOMMENCAIT TOUT ?

Nous sommes en l'an 2050. Le progrès technique a bouleversé la société au point que la jeunesse, accablée de confort matériel, a perdu tous ses repères. A la suite de la découverte d'une stèle au cours d'une promenade, après avoir déchiffré le message qu'elle portait, un « groupe de Sages » se forme autour d'une Confrérie initiée par leur bisaïeul Léon de Belmonte.Dès lors, débute une quête vers la Sagesse.

LES PREMIERES PAGES DE ET SI ON RECOMMENCAIT TOUT ?

Je cherche le bonheur qu'aucun argent ne sait donner...

Anonyme 

Un empereur romain s'est exclamé à propos de son ennemi condamné à mort :

« Non ! Ne le tuez-pas !

 Je l'exhorte à vivre éternellement… »

Années 2048-2050

- Mlle Justine Trévisan-de Belmonte, voulez-vous prendre pour époux Monsieur X, ici présent ?

Justine, visage blême, bouche crispée, a envie de fuir mais que faire devant cette assemblée sévère et attentive, qui n’attend que la réponse pour se lever et applaudir l'événement tant attendu ?

Dans un silence de plomb, une voix à peine audible sort de la bouche crispée et, dans un souffle, prononce un « oui » tremblant soulevant à la ronde un murmure d’apaisement. Tous se lèvent, les chaises crissent sur le parquet ciré, le Maire approuve d'un large sourire, les familles se congratulent, tous sont heureux.

Justine ressemble à une fée dans sa robe blanche immaculée. Ses grands yeux effarés sont dissimulés derrière une voilette argentée que son époux relève d’un geste autoritaire. Désormais, elle est sienne.

Le couperet vient de tomber. Mlle Trévisan de Belmonte s’appelle désormais Madame Justine X aux yeux de la loi et des hommes jusqu’à la fin de sa vie.

JUSTINE

Justine, réveillée en sursaut, hurle et se dresse sur son lit. Le vent violent vient d’ouvrir brutalement la fenêtre et la pluie, telle une furie, se déverse à flots dans sa chambre.  Sur son visage encore effrayé, ses lèvres semblent murmurer encore un « oui » à peine perceptible chassé aussitôt dans un soupir de soulagement. Quel cauchemar ! Elle s'ébroue, reprend ses esprits, se lève, va fermer la fenêtre et revient se blottir dans la douce tiédeur de son lit.

Dehors le tonnerre gronde, les arbres plient sous le vent, la nature semble boire avidement cette eau miraculeuse tombée du ciel.

« Rien d’étonnant, c’est l’orage du 15 août, il fait si chaud ces temps-ci ! »

Subitement, le cauchemar refait surface et lui donne des frissons.  Elle ne désire rien de plus que liberté et paix intérieure, cette paix tant recherchée et si difficile à atteindre. Le mariage  n'existe plus et la vie à deux, même dans une prison dorée, ne l'a jamais fait rêver. 

Elle est jeune. Le monde s’ouvre devant elle plein d'espoir mais aussi d’inquiétude…

- Vous êtes le portrait de votre mère, Justine.

- je sais, dit-elle en riant, mais je n’aurai pas la même vie !

- Pourquoi donc ? Votre mère n’est pas malheureuse, elle a tout ce qu’elle désire. A votre place, je remercierais la providence de vous avoir donné un tel exemple.

-Vous plaisantez ? Leur couple comme modèle ? Merci !

Une pirouette et Justine s'en va.

Elle  est la seule héritière d’une entreprise de pêche gérée par son père, Marc-Antoine Trévisan dont l’intention a toujours été de laisser la direction des affaires à sa fille, mais celle-ci n’a jamais été intéressée. Son enfance et son adolescence ont été bercées par des réceptions mondaines, des invitations, des conversations animées dans lesquelles les mots voyage, bénéfice, rapport, revenu, perte, onéreux… revenaient sans cesse.

Justine, en côtoyant tous ces gens affairés dont le seul but est de gagner toujours plus d’argent, est arrivée à la conclusion qu’elle préfère passer son temps à rêver plutôt que de porter le poids de la direction d'une entreprise.

- Ton arrière-grand-père Léon, ton grand-père Charles et nous, avons tout fait pour te mettre à l’abri. Tu as déjà un certain âge et ton avenir, quoique tu en dises, est de travailler avec ton père. Il t’attend dans son bureau à 17 heures. Sois précise.

Justine a un caractère affirmé et l’autorité de sa mère ne l’impressionne guère. Une pirouette, un pas de danse, elle tourne le dos et disparaît en claquant la porte.

- Je ne comprends pas notre fille, dit Marc-Antoine,  nous l’avons élevée dans l’amour, l’aisance, et lui avons inculqué morale et respect. Elle n’a aucune notion de ces valeurs et n’en fait qu’à sa tête. Le pire est qu'elle est notre fille unique et qu'elle héritera d’un énorme patrimoine à notre disparition.

–Elle fera sa vie et son compagnon prendra notre suite, répond Marine.

–Elle refusera tous ses prétendants et préférera plutôt entrer au couvent. Elle est obstinée, tu le sais bien…

Justine a largement atteint l'âge du mariage et ses parents s'inquiètent beaucoup pour son avenir. Elle est jolie, pétillante, sensible dans ses propos, un peu trop directe parfois mais surtout d'une lucidité extrême qui la rend terriblement méfiante.

Seul, un homme compte dans sa vie mais elle ne peut l'avouer. Ce serait un scandale dans la famille Trévisan-de Belmonte parce que, cet homme, déjà en couple, a 22 ans de plus qu'elle et un lien de parenté. Il s’agit d’un petit cousin dont la mère, dans le temps, avait provoqué un véritable scandale chez les Belmonte...

Cet homme n’est autre que le petit-fils illégitime de l'aïeul Léon de Belmonte.