CES LETTRES-LA
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CES LETTRES-LA est un roman de Nadège MIANET.
« Ces lettres là » sont une ode à l’enfance.
Description
Que vient chercher Anouk, trente ans, lorsqu’elle se rend à l’ile Maurice à la demande d’un père, qu’elle n’a jamais connu ? Contradictions, faiblesses, douleurs jalonneront son parcours à la découverte d’une famille insoupçonnée.
Son histoire s’avère un cheminement initiatique au cœur d’une île déroutante et nous entraîne dans l’intimité des hommes où chaque événement prend sens.L’anecdote devient universelle sous le sceau du pardon.
Finalement, « Ces lettres là » sont une ode à l’enfance.
LES PREMIERES PAGES DE CES LETTRES-LA :
Elle regrette d’être venue. Sa main gauche, où s’affiche son alliance, se crispe. Elle broie le métal austère de l’accoudoir.
Elle sent la douleur irradier sa paume. Curieusement, ce malsoulage son autre souffrance… Celle qui vit recluse aux abysses de ses pensées.
La dernière secousse de l’atterrissage la bouscule. La lumière violente du jour l’inonde. Elle la contraint à fermer les yeux.
« Pourquoi est ce que je suis venue ? Pourquoi est ce que j’ai obéi ? » Elle a renié sa ligne de conduite. Sa crainte de le rencontrer, perception de son emprise, lui donne la nausée.
Elle s’en veut d’avoir donné un signe de compassion à l’homme dont elle pensait n’entendre définitivement que le
silence.
Elle a pris le chemin qu’il a tracé pour elle. Elle est venue.
Elle a croisé son regard lointain et a accepté de venir. Pourtant, pas un mot, pas une discussion entre eux. Juste un courrier glissé dans sa boîte aux lettres, par une main innocente qui ignorait qu’elle n’aurait pas dû l’y déposer.
Il fallait laisser perdurer l’histoire silencieuse de leur relation effilochée. Aucun souvenir commun. A force de détache6ment, elle l’avait porté, sans ployer, ce lourd sac de l’enfance spoliée.
Tout son mépris pour « le vieux » noircit le halo du jour qui franchit le hublot.
Mais elle n’a pas su lui refuser. Obéissance enfantine, soumission inconsciente. Elle s’en veut de son incapacité à répondre «Non» à son si petit mot ainsi rédigé : « Il faut que tu viennes, Papa». Ridicule, minable, honteux.
Lui écrire, bien sûr, c’est ce qu’elle aurait du faire si elle avait eu un peu de courage ! Lui dire tout simplement qu’elle
ne viendrait pas. Qu’elle avait sa vie, ici, à Paris. Lui répondre qu’elle était enseignante, que ses élèves avaient besoin
d’elle. Tout comme son mari. Que de toute façon, après tant d’années sans se connaître, il n’y avait rien aujourd’hui à en
tirer.
Se parler ne leur apporterait rien d’autre qu’un vilain remueménage de rancœurs. De la souffrance à arroser, qui allait
pousser sous leurs yeux. Ca, elle n’en voulait pas. Bien sûr, si elle avait eu un peu d’aplomb, c’est cela qu’elle aurait du
répondre en retour.
Mais il était son père et le simple bout de papier timbré avait suffi à mettre en route tout le mécanisme de la filiation. L’approbation inconsciente du regard de cet homme, qu’elle quêtait toujours. « Le vieux » était habile. Il avait su manipuler le
fil invisible qui tissait en dépit, d’elle même, le lien avec le père. Elle jette de nouveau un œil par le hublot et la lumière
perlée du jour, soudain plus douce, la détend. Le Boeing roule sur le tarmac suivant un chemin connu du seul pilote.
Elle est arrivée sur l’île, là où il s’est échoué il y a si longtemps. Sa mémoire ne peut se souvenir de ce qu’il était. Elle
ne l’a jamais connu. Elle cherche pourtant en elle un visage, une voix, une odeur. Tous ne sont qu’imaginaires. Les
contours de l’absence n’ont pas de forme humaine.
L’appareil s’arrête. Une voix annonce que la température au sol frise les 30 degrés. Les applaudissements des passagers
retentissent. Chacun se presse vers l’avant comme des enfants à la sortie de l’école. Du haut de la passerelle où elle se
tient, le halo chaleureux entoure l’avion et la réconforte. Elle s’abreuve à la lumière. Son regard s’évade vers le ciel qu’elle
a traversé depuis la France jusqu’à l’île. Enfant, elle a si souvent invoqué le ciel. Il l’a accompagné dans ses grandes solitudes. Il lui est familier où qu’elle se trouve. Elle se sent soudain rassurée. La lumière est bienfaisante.
« Le voyage au soleil », c’est la seule chose qu’elle a su dire lorsque Loïc lui a demandé pourquoi elle avait envie de rejoindre son père. Il avait la faculté de mettre à nu ses contradictions. Il déjouait ses incertitudes. Prise au piège,
elle n’avait rien trouvé d’autre à répondre en hésitant que :
«Depuis deux ans, ma thèse, l’appartement à retaper, je suis fatiguée. Je vais me reposer là bas…
Elle sent la douleur irradier sa paume. Curieusement, ce malsoulage son autre souffrance… Celle qui vit recluse aux abysses de ses pensées.
La dernière secousse de l’atterrissage la bouscule. La lumière violente du jour l’inonde. Elle la contraint à fermer les yeux.
« Pourquoi est ce que je suis venue ? Pourquoi est ce que j’ai obéi ? » Elle a renié sa ligne de conduite. Sa crainte de le rencontrer, perception de son emprise, lui donne la nausée.
Elle s’en veut d’avoir donné un signe de compassion à l’homme dont elle pensait n’entendre définitivement que le
silence.
Elle a pris le chemin qu’il a tracé pour elle. Elle est venue.
Elle a croisé son regard lointain et a accepté de venir. Pourtant, pas un mot, pas une discussion entre eux. Juste un courrier glissé dans sa boîte aux lettres, par une main innocente qui ignorait qu’elle n’aurait pas dû l’y déposer.
Il fallait laisser perdurer l’histoire silencieuse de leur relation effilochée. Aucun souvenir commun. A force de détache6ment, elle l’avait porté, sans ployer, ce lourd sac de l’enfance spoliée.
Tout son mépris pour « le vieux » noircit le halo du jour qui franchit le hublot.
Mais elle n’a pas su lui refuser. Obéissance enfantine, soumission inconsciente. Elle s’en veut de son incapacité à répondre «Non» à son si petit mot ainsi rédigé : « Il faut que tu viennes, Papa». Ridicule, minable, honteux.
Lui écrire, bien sûr, c’est ce qu’elle aurait du faire si elle avait eu un peu de courage ! Lui dire tout simplement qu’elle
ne viendrait pas. Qu’elle avait sa vie, ici, à Paris. Lui répondre qu’elle était enseignante, que ses élèves avaient besoin
d’elle. Tout comme son mari. Que de toute façon, après tant d’années sans se connaître, il n’y avait rien aujourd’hui à en
tirer.
Se parler ne leur apporterait rien d’autre qu’un vilain remueménage de rancœurs. De la souffrance à arroser, qui allait
pousser sous leurs yeux. Ca, elle n’en voulait pas. Bien sûr, si elle avait eu un peu d’aplomb, c’est cela qu’elle aurait du
répondre en retour.
Mais il était son père et le simple bout de papier timbré avait suffi à mettre en route tout le mécanisme de la filiation. L’approbation inconsciente du regard de cet homme, qu’elle quêtait toujours. « Le vieux » était habile. Il avait su manipuler le
fil invisible qui tissait en dépit, d’elle même, le lien avec le père. Elle jette de nouveau un œil par le hublot et la lumière
perlée du jour, soudain plus douce, la détend. Le Boeing roule sur le tarmac suivant un chemin connu du seul pilote.
Elle est arrivée sur l’île, là où il s’est échoué il y a si longtemps. Sa mémoire ne peut se souvenir de ce qu’il était. Elle
ne l’a jamais connu. Elle cherche pourtant en elle un visage, une voix, une odeur. Tous ne sont qu’imaginaires. Les
contours de l’absence n’ont pas de forme humaine.
L’appareil s’arrête. Une voix annonce que la température au sol frise les 30 degrés. Les applaudissements des passagers
retentissent. Chacun se presse vers l’avant comme des enfants à la sortie de l’école. Du haut de la passerelle où elle se
tient, le halo chaleureux entoure l’avion et la réconforte. Elle s’abreuve à la lumière. Son regard s’évade vers le ciel qu’elle
a traversé depuis la France jusqu’à l’île. Enfant, elle a si souvent invoqué le ciel. Il l’a accompagné dans ses grandes solitudes. Il lui est familier où qu’elle se trouve. Elle se sent soudain rassurée. La lumière est bienfaisante.
« Le voyage au soleil », c’est la seule chose qu’elle a su dire lorsque Loïc lui a demandé pourquoi elle avait envie de rejoindre son père. Il avait la faculté de mettre à nu ses contradictions. Il déjouait ses incertitudes. Prise au piège,
elle n’avait rien trouvé d’autre à répondre en hésitant que :
«Depuis deux ans, ma thèse, l’appartement à retaper, je suis fatiguée. Je vais me reposer là bas…